Caractérisation de la dynamique des « systèmes de culture » en zone soudano-sahélienne de l’Afrique de l’Ouest par modélisation spatialisée des cultures et analyse de séries temporelles d’images satellite

Date de mise à jour : 7 avril 2017

Thèse de doctorat - Spécialité Agronomie, soutenue par Camille Jahel le 7 décembre 2016 à AgroParis Tech, Paris

Résumé:

Contexte

Dans un contexte de sécurité alimentaire, l’évolution prévue de la population ainsi que les scénarios de changements globaux pointent l’absence de cohérence et de pertinence des outils et méthodes disponibles actuellement pour estimer et analyser les tendances des productions agricoles à des échelles allant de la parcelle à la région. Cette absence est d’autant plus criante pour les pays en voie de développement. Dans ces pays, les réseaux d’information sont réduits, la superficie moyenne des parcelles cultivées est très petite (1/2 ha), l’organisation des parcelles cultivées est très fragmentée, leur gestion très variable et enfin les moyens alloués très faibles. Si des scénarios de tendances à l’échelle d’une parcelle ou d’un système d’exploitation sont applicables, il est difficile de les transposer et d’en estimer leur performance à des échelles adaptées aux prises de décisions et d’aménagement, qui doivent pouvoir s’effectuer aux échelles des régions administratives et des pays ou groupes de pays (Baron et al., 2005). En effet, pour ces types d’exploitations, ou encore dans des zones présentant une très grande dynamique d’occupation des sols, il est très difficile d’en estimer la variabilité spatiale, les superficies concernées ainsi que leurs dynamiques temporelles à des échelles appropriées à un contexte de suivi des risques saisonniers, d’aménagement du territoire et de gouvernance. L’estimation des rendements se base sur des modèles contraints par des processus climatiques locaux, des pratiques agricoles locales (espèces, variétés, intensification) et sa traduction en production doit intégrer les modes de gestion du terroir que l’on englobera dans ce contexte d’étude comme «système de culture » (Leenhardt et al., 2010 ; Traoré et al., 2011). Pouvoir répondre aux questions posées par la sécurité alimentaire et les tendances observées et à venir implique de changer d’échelle et de passer de la parcelle (ou groupe de parcelles cultivées) à la région. Ce changement d’échelle bute sur un ensemble de problèmes qui rendent les méthodes utilisées peu fiables : 1) un réseau sol, alimentant les variables de forçage des modèles, clairsemé et déséquilibré, 2) un accès réduit et aléatoire à ce réseau en temps réel ou semi réel (tous les 10 jours), 3) un environnement climatique très variable non seulement spatial mais aussi saisonnier et inter-annuel, 4) des pratiques anthropiques diversifiées, 5) des superficies très petites et fragmentées. Plusieurs études et indicateurs permettant d’estimer les performances et l’intérêt des satellites de moyenne résolution et hautes résolutions dans la description de l’utilisation des sols et de sa dynamique, et plus récemment dans la cartographie des systèmes de culture (e.g. Vintrou et al., 2012). Nous nous intéressons à l’objet « système de culture » dont l’échelle est pertinente à la fois pour le lien avec le terrain – elle reflète l’organisation spatiale des activités de l’agriculture – et aussi pour une analyse par télédétection, car cette organisation est généralement visible sur les images, contrairement aux parcelles de culture. 

Objectif 
L’objectif est d’étudier et de documenter la variabilité des « systèmes de culture » en zone soudano-sahélienne de l’Afrique de l’ouest pour évaluer la possibilité de leur suivi par des séries temporelles d’images moyenne résolution. Cette évaluation utilisera une approche de changement d’échelle basée sur la modélisation de dynamiques spatiales qui combine différentes sources d’information provenant de réseaux sols, de cartes thématiques, de modèle de culture (SARRA-H) et d’images satellites.

Méthodes
Plusieurs « systèmes de culture » (SdC) choisis pour représenter la diversité des SdC rencontrés dans le pays seront étudiés plus en détail : 1) leurs contenus (% des différents types de culture, jachères, forêts, pâturages, sols nus) ainsi que leurs organisations spatiales (à l’aide de métriques qu’il s’agira d’identifier) seront décrits à partir d’images satellites HRS et THRS (Haute et Très Haute Résolution Spatiale) et d’autres sources de données, et 2) les SdC seront modélisés à l’aide d’un langage de modélisation de dynamiques spatiales à base de graphes d’interaction (Ocelet ; Degenne et al., 2010 ; Degenne, 2012) en utilisant la description faite en (1). Ocelet, qui est aussi un environnement de développement de modèles, permet de recomposer un SdC à partir de ses constituants (parcelles de culture, ou autres entités spatiales), et de simuler leurs évolutions tout en tenant compte des possibles interactions entre eux. Le modèle SARRA-H (Baron et al., 2003) sera intégré au modèle de SdC comme modèle de culture pour différentes céréales (mil, sorgho, maïs) et permettra de simuler une diversité de pratiques : variétés culturales, stratégies, gestions de semis et de récolte. Une fois le modèle spatialisé construit, il servira à : i) étudier comment les évolutions des différents constituants des SdC sont perçues dans les séries temporelles d’images de moyenne résolution, et ii) vérifier si ces séries d’images peuvent à l’inverse être utilisées pour améliorer l’estimation par le modèle de la production des SdC. On aurait alors un outil permettant d’analyser les prospectives d’adaptation des systèmes de culture dans différents scénarios de changements globaux. Cette modélisation à l’échelle de SdC, prenant en compte son hétérogénéité intrinsèque, n’a jamais été tentée auparavant, en raison de la difficulté du problème de changement d’échelle.

Date de mise à jour : 7 avril 2017